Exposition
"Perdre la tête"
22 figures féminines
et retrospective peintures, lithographies
Samedi 30 septembre
Dimanche 1 octobre de 18h à 22h
40 rue Georges Politzer
SAINT DENIS
codes 4013 A
7985 A
rdc droite
artiste peintre
22 figures féminines
et retrospective peintures, lithographies
Samedi 30 septembre
Dimanche 1 octobre de 18h à 22h
40 rue Georges Politzer
SAINT DENIS
codes 4013 A
7985 A
rdc droite
un texte de Josette Marty
Le témoin se présente, son regard fixe l’innommable, se taire ou montrer les choses vues ?
Choses vues silencieuses, elles glissent dans la perception paresseuse, suscitent les mémoires dans un cortège de réminiscences enfouies.
Derrière des paysages obscurcis peut-on découvrir l’horreur commise ?
Sombres paysages parcourus par ceux qui marchent dans l’effroi d’un camp à l’autre.
Parcours vers l’inconnu de la mort brouillé par les bleus d’un ciel apparu au détour du noir de la forêt.
Quelquefois un village traversé où des femmes se cachent derrière leurs vitres pour échapper à ces choses vues.
Déportés que l’on disait grands assassins et voleurs saisissent par leur regard, tête à peine redressée, des femmes entretenant la terre ou des fillettes venues aider.
Dérobées à la surveillance des bourreaux, dans le noir de l’effroi, ces choses vues ont pour destin le revenir. Elles luttent contre l’oubli dégageant les mémoires pour sauver d’une seconde mort les suppliciés des marches de la mort.
Le temps dans ses habits de tailleur ravaude, organise le retour des images. Elles vibrent dans l’obscur des consciences. Des couleurs sont là, en aplat soigné dans une transparence qui illumine les choses vues contre l’oubli.
L’oubli, sujet tapageur laisse monter dans la lumière les choses vues.
Sont-elles, souvenirs, images du fantasme, vigies, ces fillettes qui se livrent sortant de la transparence féconde des couleurs qui s’enchevêtrent ?
Ces fillettes ont existé, les photos frêles l’enseignent. Elles seront ces petits personnages par lesquels transitera le nommé des choses vues.
Contre l’oubli, l’artiste avance son lent travail avec outils et mains tachées, façonne l’informe du fatras des mémoires.
Dans son obstination créatrice, l’artiste œuvre avec prudence. Il est dans le dé-chiffonnage des traces. Il affirme, il confirme. Il prend place éphémère dans la boite noire pour restituer vie aux fillettes
Elles étaient dans la vie. Elles seront maintenant dans le visible de l’art pour que vibrent les choses vues.
Ces fillettes, dans la figuration des choses vues, gardent leur fraicheur et s’exposent dans la lumière de leur joie enfantine. L’une d’elle danse malgré les guerres, l’autre à la fontaine sourit. Deux de ces petites, sur une table s’exhibent, elles vont peut- être chanter le kaddish des choses vues.
Les formes
humaines au loin marchent sur le chemin de la mort dans la transparence des
couleurs qui insistent bleu et noir selon le choix de l’artiste. Le déni des vivants pousse vers le silence
les vérités du moment. Ces choses vues ont
survécu. Elles sont dans le présent de l’art.
Voilà ce qui est saisi : des fillettes, des femmes. Du féminin extrait des
replis de l’oubli.
Il existe une parole qui dit qu’aucun enfant ne fut photographié mort au sortir du four crématoire.
Déportés adultes, nous connaissons vos morts de suppliciés. Mais les enfants au sortir de l’ultime douche avons-nous pu mémoriser leur image ? Des choses ont existé que nul n’a vu.
Alors reviennent les figurations des fillettes.
Derrière les clichés tachés de noir sont-elles dans la poussière des cendres de
tous les enfants massacrés. La joie manifestée cache-t-elle l’horreur
commise ? Cette joie appelle la vigilance.
Nul n’a vu les cendres. Tous les ont sous le regard.
Il est nécessaire que l’artiste dans sa marche lente donne transparence aux choses vues et découvre les choses non vues, exhume paysages et forêts agressives. De sombres bâtisses se profilent. Quelques fois des barbelures se dressent.
Nul ne voit la longue route qui mène d’un camp à l’autre, nul ne voit l’humain, adulte-enfant brulés et pourtant tout est là sous les yeux. Il suffit de fouiller du regard.
Ce qui fut caché est montré.
Le témoin se retire, son regard a fixé ce qui restera
l’horreur commise.
Il laisse libre destin aux choses vues, aux choses enfouies. n
Josette Marty